L'espoir pour 2026
  • mar, 23/12/2025 - 13:56

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1652|MARDI 23 DÉCEMBRE 2025.

«Les Etats n'ont pas d'amis, juste des intérêts»

Selon des commentateurs, Kigali ne serait pas disposé de quitter Uvira malgré l'annonce faite par ses « Congolais de service ». Dans un communiqué, les FARDC confirment cette perception.

Kigali oublie une vérité sortie de la bouche de Charles de Gaulle le 9 décembre 1967 dans un entretien à Paris Match: « Un grand pays n’a pas d’amis. Les hommes peuvent avoir des amis, pas les hommes d’État ».

Henry John Temple, premier ministre du Royaume Uni, de 1855 à 1858 et de 1859 à sa mort en 1865, 3e vicomte Palmerston, connu sous le nom de lord Palmerston, en 1848, dans un speech à la Chambre des Communes (parlement britannique), avait dit : « We have no eternal allies, and we have no perpetual enemies. Our interests are eternal and perpetual, and those interests it is our duty to follow » (Nous (l'Angleterre), n’avons pas d’amis ou d’ennemis permanents ; nous n’avons que des intérêts permanents). Qu'est-ce que l'Histoire n'a pas appris au monde ?

Oublie-t-on le sort de Jonas Malheiro Sidónio Savimbi, le chef de l'Unita, le mouvement armé opposé au régime prosoviétique de Luanda, qui effectua une visite de dix jours aux États-Unis, fut reçu à la Maison-Blanche par Ronald Reagan, se fit promettre «une aide» de 15 millions de $US dans sa guérilla prélevés sur les fonds d'urgence de la CIA, débloqués comme aide militaire «secrète», fut abandonné plus tard, tué, le 22 février 2002, au bord de la rivière Luvuei dans la province de Moxico, avec 21 de ses gardes du corps, par 15 balles?

A-t-on oublié le puissant président libyen Mouammar Kadhafi à qui l'alors puissant ministre de l'Intérieur français, Nicolas Sarkozy, élu président de la République, qui reçut des millions de $US pour le financement de sa campagne en 2007, en contrepartie du retour du chef libyen sur la scène internationale, lui a donné une mort tragique ?

LES INTÉRÊTS.
En politique comme dans la vie, il n'existe pas d'amis éternels, sauf les intérêts sont éternels. Ceux qui ont les intérêts en commun, ne sauraient se faire la guerre.

Quand on observe les signes depuis l'événement du 4 décembre, à l'Institut des États-Unis pour la paix à Washington, débaptisé la veille Institut Donald Trump pour la paix, à savoir, la signature par les présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame, devant d'autres chefs d'État africains, de l'accord de Washington, négocié et vanté par les Américains, cérémonie présidée par Trump, accord qui comporte la signature du président américain, aucun doute possible : il y va d'une question existentielle pour les Américains.

Face à la menace chinoise, l'heure a sonné pour les États-Unis de se mettre debout. D'où l’activation du projet du port en eau profonde de Lobito (reliant Ndola en Zambie, traversant l'ex-province congolaise du Katanga par Kolwezi, puis l'Angola, débouchant sur Lobito, à la côte atlantique), projet qui va assurer une liaison en une semaine contre plus d'un mois présentement, entre l’océan Atlantique et les régions minières congolaises et zambiennes qui produisent les minerais les plus recherchés au monde, critiques ou stratégiques, le cobalt, le cuivre, le lithium.

L'une des rares visites que l'ancien président Joe Biden en fin de mandat effectua en Afrique fut celle de Lobito, le 4 décembre 2024. Son successeur Donald Trump vient de mettre 553 millions de $US à la disposition de l’opérateur Lobito Atlantic Railway.

Face au Rwanda, Washington a, ces jours-ci, changé de ton. Il n’avait jamais usé de mots aussi forts contre Kigali. Marco Rubio, le secrétaire d'État, sur son compte X : « Les actions du Rwanda dans l'Est du Congo constituent une violation flagrante des accords de Washington signés par le président Trump, et les États-Unis prendront des mesures pour garantir les promesses faites au président » @SecRubio.

Christopher Landau, secrétaire d'État adjoint surenchérit : « La récente offensive d'Uvira a été une erreur grave et inhabituelle» @DeputySecState. En conférence de presse de fin d’année, Marco Rubio défend « America First », affirme que « les engagements signés mais violés existent, permettant désormais aux États-Unis d’exiger des comptes et d’exercer des pressions pour leur respect » @SecRubio.

Le 12 décembre 2025, lors d’une réunion d’urgence du Conseil de Sécurité des Nations Unies sur la situation sécuritaire dans les Kivu, l’ambassadeur américain Mike Waltz, avait frappé fort, assurant que les États-Unis « utiliseront les outils à (leur) disposition pour tenir responsables les fauteurs de troubles de la paix » au Congo.

En autorisant ses forces déployées au Congo de prendre la troisième ville du Sud-Kivu, en leur fournissant les armes les plus sophistiquées, Paul Kagame, « intimement impliqué dans la planification et l’exécution de la guerre dans l’est de la RDC », a franchi la ligne rouge.

« Le président Trump s’est réjoui d’avoir réuni le président de la RDC Tshisekedi et le président rwandais Kagame à Washington le 4 décembre pour la signature des accords de Washington et du cadre d’intégration économique régionale. C’était une démonstration et un effort vrai et sincère vers la paix (…).

Et les États-Unis sont profondément préoccupés et incroyablement déçus par la reprise de la violence dans l’est de la RDC (…). Depuis sa réémergence en 2021, le Rwanda exerce un contrôle stratégique sur son groupe armé par procuration, le M23, ainsi que sur l’aile politique du M23, l’Alliance du fleuve Congo (AFC), et a déployé le M23 et l’AFC pour atteindre les objectifs géopolitiques du Rwanda dans l’est de la RDC. Kigali a été intimement impliqué dans la planification et l’exécution de la guerre dans l’est de la RDC, en fournissant une direction militaire et politique aux forces du M23 et de l’AFC depuis des années maintenant.

Les Forces de défense rwandaises ont fourni du matériel, de la logistique et un soutien à l’entraînement au M23, ainsi que des combats aux côtés du M23 en RDC avec environ 5000 à 7000 soldats début décembre. Cela ne compte pas les augmentations possibles du Rwanda dans cette avancée la plus récente.

Ces derniers mois, le Rwanda a déployé plusieurs missiles sol-air et d’autres armes lourdes et sophistiquées dans le Nord et le Sud-Kivu pour aider le M23 dans son conflit contre la RDC. Le Rwanda et le M23 ont commencé leur offensive juste ce week-end dernier pour prendre Uvira, avec des forces rwandaises colocalisées avec le M23 le long des lignes de front. De plus, nous avons des rapports crédibles sur l’utilisation accrue de drones suicides, une utilisation accrue d’artillerie par le M23 et le Rwanda, y compris des frappes au Burundi.

Donc, plutôt qu’une marche vers la paix, comme nous l’avons vu sous la direction du président Trump, ces dernières semaines, le Rwanda conduit la région vers une instabilité et une guerre accrues. À la lumière des engagements pris dans les Accords de Washington, nous sommes profondément préoccupés par le maintien de la présence militaire rwandaise sur le territoire congolais en soutien au M23. Nous utiliserons les outils à notre disposition pour tenir responsables les fauteurs de troubles de la paix ».

Vendredi 19 décembre, une autre représentante des États-Unis aux Nations Unies, y est revenue, condamnant l’avancée des troupes pro-rwandaises ainsi que le soutien du Rwanda, estimant que cela est contraire aux accords de Washington. « Le M23 doit immédiatement se retirer à au moins 75 kms d’Uvira et se conformer à l’ensemble de ses obligations prévues par l’accord-cadre », a-t-elle insisté.

Faut-il souligner ce Pacte de Partenariat pour la Sécurité et la Défense signé à Washington avec les États-Unis en lien avec la coopération dans le domaine du renseignement, de la surveillance technologique, de la fourniture d'équipements militaires, etc.

Que Kigali bénéficie d'autres appuis ne change rien. Sûr que la paix arrive. 2026 ne sera pas comme 2025. Au Congo de se préparer à la guerre en restructurant tous ses moyens.
T. KIN-KIEY MULUMBA.


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