L’ancêtre Mbala volé retrouvé en Autriche
  • jeu, 29/03/2012 - 20:27

LE SOFT INTERNATIONAL N° 1157 DATÉ 23 MARS 2012.
Deux énormes autocars type «long vehicle» déchargent 300 personnes. Membres de la communauté Mbala, ces hommes et femmes arrivent de différentes communes de la Capitale. On est sur ce site surélevé des jardins présidentiels du Mont Ngaliema jadis lieu culte du Mobutisme triomphant, siège de l’Institut des Musées Nationaux du Congo.
Jour exceptionnel ce vendredi 16 mars pour l’IMNC et pour l’ethnie Mbala conduite par son autorité traditionnelle et coutumière, le Seigneur Guy-Modeste Masini Mangubu. Il y avait là aussi un groupe traditionnel, une calebasse de vin de palme et de la noix de cola...

«ON A VOLE LA REINE MERE MBALA...»
Le Seigneur Guy-Modeste Masini Mangubu a la mémoire forte. Il y a quelques années, il était en ces lieux, en avait visité les œuvres d’art traditionnel et n’avait su se retenir! «La Reine Mère Mbala, où est la Reine Mère Mbala? On a volé la Reine Mère Mbala!».
Il en donne la description. Une statue en bois sculpté de 640 mm, morphologie d’homme-femme, cheveux tressés, tête coiffée de crête, le menton porte une barbiche, ventre proéminent reposant sur des membres inférieurs, les bras ont subi les violences du temps...
Directeur général de l’IMNC, le professeur Joseph Ibongo Gilungula, d’ethnie Mbala - le hasard n’existe pas - ne cache pas sa douleur.
Voici dix ans depuis sa création que l’IMNC noyait dans un climat d’insécurité. Avec l’entrée des forces de l’Afdl, le 17 mai 1997, le patrimoine culturel conservé, était menacé jour et nuit par des razzias d’hommes en armes. De 1997 à 2000, des dommages sans nom ont été commis sur le patrimoine. Un véritable crime...
Sur la liste des œuvres pillées figurent des objets d’art traditionnel de grande valeur historique. Dans ce lot deux œuvres d’art d’origines ethniques Zandé et Mbala...
Tôt, les Musées nationaux ont saisi le gouvernement.
Ils ont passé le signalement à Interpol, la police des polices du monde, à son siège de Kinshasa. Nombre d’institutions muséales dans le monde ainsi que des organismes internationaux gestionnaires du patrimoine culturel ont été informés du crime et pistent les pilleurs dans les musées et les maisons de vente aux enchères. Objectif: bloquer toute forme de transaction qui serait faite sur ces œuvres volées... Interpol et ses partenaires se tiennent en alerte. L’IMNC mène un travail de localisation, d’identification et de récupération des œuvres du Patrimoine culturel national.
Dans le pays, avec l’aide de l’Unesco, des ateliers de sensibilisation ont lieu dans les domaines de lutte contre le trafic illicite des biens culturels, de formation et d’information des hommes en armes sur la protection du patrimoine culturel national. Cela a abouti à l’élaboration d’un vade-mecum culturel mis à la disposition du militaire en R-dC sur la protection du patrimoine. En 2010, Interpol organise à Vienne, en Autriche un atelier sur la lutte contre le trafic illicite des œuvres d’art commercialisées en Europe. Dépourvus de moyens financiers, les Musées nationaux du Congo ne peuvent faire le déplacement. Trop coûteux. Mais l’IMNC a trouvé un succédané. Via Interpol Kinshasa, l’Institut a ficelé un dossier sur ses œuvres volées. La réaction arrive vite. Via Internet, l’Institut reçoit une alerte.
Sous le titre «l’Art tribal en Afrique», une vente aux enchères va se dérouler à Vienne. Les œuvres mises en vente proviennent d’une collection «inconnue» qui auraient appartenu à un homme décédé, le prof. Dr Rudolf Leopold et qui, à sa mort, les a cédées à sa veuve, Mme D. Elisabeth Leopold. La vente a lieu le 3 mai 2011 à la maison des enchères de Dorotheum de Vienne. Les œuvres sont identifiées sous les lots n°107 et 131. Les Musées nationaux se mettent en branle. Et sollicitent que Dorotheum fasse surseoir à la vente. A la demande du parquet de Vienne, les œuvres sont retirées de la vente, un juge prend un décret de saisie sous le dossier n°11UT 188/1K et désigne dépositaire le responsable de Dorotheum de Vienne. L’IMNC a gagné une partie. Pas la guerre qui se poursuit. L’affaire doit passer devant le tribunal.

QUAND MME LEOPOLD PASSE AUX AVEUX.
Veuve du Dr. Rudolf Leopold, collectionneur d’œuvres d’art autrichiennes décédé en 2010, Mme Dr. Elisabeth Leopold dit avoir hérité ces objets de son défunt mari. Elle ne peut en fournir les preuves d’achat. Mais explique que son défunt mari n’acquérait des objets d’art qu’auprès de «commerçants sérieux établis à Paris, Bruxelles, New York et Munich», ainsi qu’auprès des maisons de vente aux enchères, Sothebys et Christies. L’arrêt du juge sans équivoque. L’avocat de Mme Dr. Elisabeth Leopold s’est mis en contact avec l’ambassade de la R-dC à Bonn. Mme Dr. Elisabeth Leopold est prête à rendre ces objets d’art à son propriétaire légitime à condition d’avoir la garantie qu’ils iraient effectivement à celui-ci, non à un autre! Le 26 mai 2011, Interpol Europe contacte sa branche r-dcongolaise. A l’IMNC d’exhiber ses prétentions. L’enjeu est réel. Ces objets sont de trop grande valeur. Joseph Ibongo Gilungula doit se rendre à Vienne. C’est chose faite début octobre 2011. Dans l’attaché case du D-g, les preuves irréfutables de la propriété des deux œuvres Mbala et Zandé qui provenaient du patrimoine de l’IMNC. A Vienne, des accords sont signés pour le transfert de ces objets par voie diplomatique.
Le 25 janvier 2012 a lieu à Kinshasa sur le site du Mont Ngaliema, dans la salle de lecture de la bibliothèque de l’IMNC, la cérémonie de restitution de ces deux objets entre l’ambassade d’Autriche représentée par le Consul général Hans-Joachim Valentin et l’Insitut des Musées Nationaux du Congo, représenté par son Directeur général, le prof. Joseph Ibongo Gilungula. Un happy end...

LEGENDE MBALA1
Les Mbala conduits par le Seigneur Guy-Modeste Masini honorent leur ancêtre, un objet de valeur inestimable, par le rite traditionnel. LE SOFT NUMERIQUE.

ALUNGA MBUWA

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