«Avant d'ouvrir la bouche, dites-vous si vous avez quelque chose de nouveau ou d'original à dire»
  • ven, 19/11/2021 - 13:39

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1539|VENDREDI 19 NOVEMBRFE 2021.

Comment communiquer en politique? Communique-t-on en politique aujourd'hui comme hier de la même manière? Ce thème a occupé les échanges d'une partie de la journée de dimanche 14 novembre 2021 à la 4ème Université du P.A.

D'abord Benjamin Litsani Choukran qui a traité, en fin de matinée, des réseaux sociaux dont l'impact se mesure au Congo avec ce chiffre hallucinant : 30 millions d'abonnés au téléphone portable outre les milliards d'abonnés dans le monde et, surtout, l'interactivité que cet outil permet avec ses diverses applications. Mais 30 millions d'abonnés c'est le corps électoral national congolais!

Le dire c'est en mesurer l'impact...
Grâce au téléphone portable qui fait de l'homme d'aujourd'hui, déclare le Professeur Tryphon Kin-kiey Mulumba, un homosmartophonicus, «vous pouvez conversez avec le Président de la République», explicite Litsani Choukran, «le petit génie du numérique», comme l'avait surnommé Tryphon Kin-kiey Mulumba, et, en réalité, avec quiconque dans le monde et où qu'il soit.

Dans l'après midi, peu avant la fermeture des travaux de l'Université, c'est le thème de communication en général qui est au centre traité par le Professeur Tryphon Kin-kiey Mulumba, Docteur en Science Po, option Communication Politique, de l'Université de la Sorbonne Paris 1-Panthéon. Sur le thème comment communiquer (ou comment prendre la parole politique en public?), il explique qu'en l'espèce, il n'existe aucune réponse mathématique («la communication n'est pas une science exacte»).

«Quelqu’un nous dit : «il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler» (il faut bien prendre le temps de réfléchir avant de parler afin de ne pas risquer de regretter ce qu’on dit). A nouveau s'il n’existe aucune réponse mathématique, on y arrive par mille exercices, par l’entraînement, par l’expérience, par des questions-réponses du type : que dois-je dire dans telle situation, devant telle situation, face à tel homme, tels hommes, dans tel débat?» Extraits.

LES PRÉALABLES.
- Communiquer est-ce parler ? Est-ce ouvrir la bouche ?
- Mais on sait que parler c’est ouvrir la bouche, faire un signe, émettre un bruit.
- Or, le silence c’est aussi communiquer. Donc communiquer c’est aussi se taire.
- Parler est-ce communiquer ? Savons-nous que nous pouvons parler sans communiquer au sens de «faire connaître», «faire part de», «partager», «transmettre», «échanger», «infuser», «s’entendre», «être en rapport», chercher à régler un problème, chercher à se faire comprendre et donc à obtenir une adhésion.
A propos du silence, il existe des centaines de citations qui vantent le silence.
- « C’est dans le silence que l’on entend les plus grandes vérités » (Dalaï Lama) ;
- « Le silence de la nature hurle des vérités » (Johann Laugier) ;
- « Les mots du silence sont violents pour soi mais également pour les autres » (Sophia Sherine Hutt) ;
- « Le silence est une succession de mots inaudibles pour certains » (Cyrille Missinga).

Donc en effet le silence c’est communiquer.
Si tu me poses une question et que je ne réponds pas, c’est signe que je suis porteur d’un message. Mais lequel ? Soit je me fous de ta question, soit je me fous de toi. Ou je ne suis pas à l’aise… Je me sens mal.

Si le silence, dans certaines conditions, c’est communiquer, ce qui nous intéresse ici, c’est la communication verbale, la communication politique verbale.

La communication verbale, la prise de parole en public, quels en sont les outils ?
Comment utiliser ces outils ? Et pourquoi ? Pour quels buts ?

LES OUTILS.
I. les moyens (les contenants) ;
2. les moyens (les discours, les contenus) ;
3. les effets (les réactions).

I. les moyens traditionnels, historiques.
1.1. la presse écrite (les journaux papier) ;
1.2. la radio-télévision (l’audiovisuel) ;
1.3. les agences de presse (autrefois la presse télégraphique) ;
1.4. le cinéma, le documentaire (l’art) ;
1.5. la chanson (l’art) ;
1.6. le panneau affichage;
1.7. les flyers ;
1.8. les rassemblements publics (autrefois appelés meetings populaires, expression consacrée par Mobutu) ;
1.9. les débats publics.

2. les nouveaux moyens (les moyens alternatifs, les plus courus aujourd’hui).
2.1. les sites en ligne (les journaux d'Internet) ;
2.2. les réseaux sociaux (Twitter, Whatsapp, Messenger, Facebook, Instagram, Youtube, Tik-tok, etc. (texte, audio, vidéo), chacun ayant sa spécificité.
(C’est ce qu’on appelle le numérique, le digital, la digitalisation).

3. Mais comment prendre la décision ou comment choisir quel média, à quel moment ? Quel choix opérer ?
(En tant que politiques, nous sommes tous des communicants. Et demain, nous serons tous dans des meetings, dans des débats. Donc, je ne m’adresse pas aux seuls communicants).

3.1. le choix est une décision cruciale (elle est sans appel) ;
3.2. Mais avant de faire le choix, il faut disposer d'outils d'appréciation et savoir les maîtriser (être informé des médias en vue de faire un choix judicieux, un choix approprié) ;
3.3. De ce choix que TOUT dépendra. Que tout va basculer...
3.3.1. Quelle plume écrira ce texte ? (Quelle plume écrira quel texte?)
3.3.2. Quelle bouche couvrira (reportera) cet événement (Mieux, quelle bouche approprié) couvrira (reportera) quel événement)?

- À quel moment ? (l’occasion ? l’opportunité ?).
Opportunité/décision. « On juge, on discute de l’opportunité d’une décision, d’une mesure, on considère si elle convient au temps, au lieu, si elle se produit à propos. Occasion désigne une circonstance particulière, opportune parce qu’elle favorise un dessein, et propice à ce que l’on entreprend ».

3.3.3. NB : Toutes les plumes et toutes les bouches ne se ressemblent pas. Toutes les plumes et toutes les bouches ne sont pas faites pour dire la même chose.
3.3.4. Tous les jours (tous les moments) ne se ressemblent pas. Ce qui était possible hier, ce qui pouvait se dire hier, peut ne pas l’être aujourd’hui, demain, après-demain (occasion, opportunité).
3.3.5. Quels mots appropriés seront choisis? (Et pour quel public, pour quel espace ?)
3.3.6. Avec quelle intonation ? Sur quelle épaisseur (s’agissant de la presse écrite) ?
3.3.7. À quelle place ?
3.4.8. À la UNE, à la deuxième, à la troisième, à la dernière ?

2. LES DISCOURS.
Quel discours (quels contenus, quels éléments de langage) développer à quelle occasion ?
Retenez : « Toute vérité n’est pas bonne à dire » (toute parole ne peut être entendue).

NB : Mais il n’existe ici aucune réponse mathématique. Tout est laissé au choix du décideur/du locuteur...
Et c’est ici que se révèle ou non LE TALENT, LE GÉNIE de chaque locuteur.

3. LES EFFETS.
Et parlons par exemple des rassemblements publics. Le mystère consiste à savoir se poser des questions du type :
- à quel moment sommes-nous aujourd’hui ?

- quels problèmes connaît le pays (ou la communauté) aujourd’hui ?
- à quoi la population (la communauté) est confrontée aujourd’hui ?
- quelle est « MA propre position politique » (celle du locuteur, du décideur, dans le pays, au sein de la communauté) ?
Puis, la question fatale: que puis-je dire ? Ce que je veux dire est-ce nouveau ?

Ou, dans les médias : que puis-je écrire (ou faire écrire) aujourd’hui qui puisse être assez ORIGINAL, assez HISTORIQUE au point de capter l’attention de la population (du plus grand nombre) et qui puisse me détacher de la multitude (de la médiocrité) et, en même temps, sans me faire haïr, sans me faire bannir, sans fauter ?

Que dois-je offrir à l’Histoire ? Que dois-je laisser à l’Histoire? (Question d’image de son organisation ou de soi-même).
Bien faire et faire (laisser) savoir. Ni user trop, ni abuser de la bouche.

Ne prenez la parole en public (et même en privé) que si vous avez quelque chose de nouveau, de GÉNIAL, à dire. Et choisissez le MOMENT OPPORTUN de le dire…

Qui ne sait qu’écouter ou lire telle personne vous captivera plus qu’écouter, lire tel autre, parce que ce que dit tel autre a souvent un contenu VIDE, voire RIDICULE ?
LE GÉNIE, LE TALENT est inné mais si tout le monde n’a pas le talent, tout le monde peut y arriver... ou, du moins, s’en approcher.

C’est d’ailleurs ce talent qui peut hisser un homme plus haut ou le descendre plus bas.
En résumé, avant d’ouvrir la bouche, de prendre la parole, dites-vous : que dois-je dire ? Comment dois-je le dire ? Par quels moyens dois-je le dire pour atteindre quels objectifs, pour en attendre quels effets politiquement positifs, salvateurs ?
- (Quelqu’un nous dit : « il faut tourner 7 fois sa langue dans sa bouche avant de parler » (il faut bien prendre le temps de réfléchir avant de parler afin de ne pas risquer de regretter ce qu’on dit).

A nouveau : il n’existe ici aucune réponse mathématique. Je dis bien : «aucune réponse mathématique ».
On y arrive par mille exercices (par l’entraînement, par l’expérience, par des questions-réponses du type : que dois-je dire dans telle situation, devant telle situation, face à tel homme, tels hommes, dans tel débat ?) mais dites-vous que les accidents (les ratages, les communications ratées, les oups, les maladresses, les ratés, etc.) ne manquent pas (ne manqueront pas) même au plus haut niveau de la décision !

Quand demain, vous vous trouverez dans un débat politique à la radio-télévision, ou dans un meeting populaire, préparez-vous d’abord.

Mettez-vous un cap. Sachez parfaitement ce que vous avez à dire et ce que vous allez dire. Anticiper sur les réactions, connaître parfaitement ses co-debaters, donc, les attaques des co-debaters.

Préparez-vous en conséquence. Quand vous vous êtes préparé, deux ou trois jours avant, voire une semaine, deux semaines avant, vous avez tout revu, tout anticipé, vous êtes détendu, gardez votre calme, vous serez le meilleur.
J’insiste : ce n’est pas tout le monde qui a l’aptitude de prendre la parole devant un public et de réussir mais il est cependant possible d’acquérir cette capacité si vous la travaillez.

Plus vous connaissez votre public, mieux vous savez comment l’amener à vous écouter : vous renseigner au préalable sur ce qui le passionne et l’intéresse. Vous informer sur ses craintes, ses désirs, ses objectifs.
Si vous ne savez pas clairement ce que vous allez dire, voilà qui engendre plus de stress…
Travaillez la forme aussi bien que le fond. Ayez la gestuelle requise… 50% de votre réussite dépend de la communication non verbale…

Captez l’attention du public, c’est, par exemple, lui poser quelques questions, maintenir le suspens et non donner directement les réponses aux interrogations.
Mais surtout : optez pour un schéma d’intervention en pyramide inversée et, donc, aller vite à l’essentiel et, donc, dès le départ, faites passer directement votre message.

Eviter toute crispation, apporter une dose d’humour afin de rompre la monotonie.
Chers Camarades, dans le monde d’aujourd’hui, la com’ c’est le smartphone.

Nous sommes tous désormais des homosmartophonicus, des soldats des armées numériques : alors si vous formez une communauté - surtout si vous êtes membre d’un parti politique -, il vous faut :

1. disposer absolument d’un smartphone Android, iOS ou autre ;
2. rester absolument connecté aussi souvent que possible ;
3. suivre absolument l’activité de votre communauté, de votre groupe, de vos groupes. C’est ça qui fait de vous un politique. Sinon, vous n’êtes rien ;
4. Pour cela avoir un compte Whatsapp, Twitter, Messenger, Facebook, Instagram, Youtube, Tik-tok, etc. C’est ça qui fait de vous un politique. Sinon, vous n’êtes rien ;
5. être et rester absolument actif, très actif pour défendre, liker les thèses de la communauté (si vous les partagez), etc. C’est ça qui fait de vous un politique. Sinon, vous n’êtes rien…;
6. Ici, je voulais interpeller chacun de nous!

Merci encore de votre attention.

Kinshasa, 14 novembre 2021.
KKMTRY.


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Tryphon Kin Kiey Mulumba