Comment faire face aux pressions extérieures qui se mettent à pleuvoir
  • ven, 19/06/2020 - 01:45

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1489|VENDREDI 19 JUIN 2020.

Sans aucun doute, s’il y a eu état de grâce pour Fatshi, cette situation appartiendrait désormais au passé. La visite toute récente à Kinshasa et à Goma d’une délégation européenne de haut rang (un ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, un ministre belge de la Défense Philippe Goffin, un Commissaire Européen (ministre) en charge de Gestion des crises Janez Lenarcic reçus en audience commune lundi 8 juin par le Président de la République, n’est pas impromptue. Il s’agit d’une mission européenne, occidentale, pensée, réfléchie, cohérente si elle a revêtu une couverture humanitaire.

«ENTRETIENS
TRES APPROFONDIS».

Les Missi Dominici européens étaient porteurs d’un message perceptible dans le propos tenu devant la presse à Kinshasa par le chef de cette délégation. «Nous avons (également) eu des entretiens très approfondis sur des questions politiques, économiques, sécuritaires et sociales», a déclaré le Slovène Janez Lenarcic. Clair comme l’eau de roche...
Comme si cela ne suffisait pas, voilà qu’Amnesty International à son tour s’en mêle.

Dans un rapport dont fait écho le 17 juin, Rfi, la radio française, cette ONG «tance» - le mot est d’elle - publiquement le président de la République disant son désaccord de voir qu’il n’a rien fait pour donner le sentiment d’une justice à ceux qui ont souffert de la répression sous le régime Kabila. Il est vrai que pendant la campagne de la Présidentielle et même avant, le Président de la République, alors opposant anti-Kabila, avait promis, s’il est élu, d’«éradiquer» le régime de son prédécesseur en faisant triompher l’Etat de droit et donc la justice.

Il a rappelé cet engagement lors de sa première visite à Washington DC en parlant de «déboulonner».
«Je le dis sans peur. Je suis là pour déboulonner le système dictatorial qui était en place», avait-il affirmé le 5 avril 2019 dans la Capitale fédérale lors d’une conférence au Council on Foreign Relations, un atelier de réflexion sur la politique étrangère américaine.
Le Président qui venait d’être reçu par le Secrétaire d’Etat Mike Pompeo avait reçu le soutien de l’administration américaine au «changement promis». «Ma présence ici interpelle les Etats-Unis à nous accompagner dans cette belle aventure et le plus longtemps possible. Sans cet appui, nous aurons des difficultés à nous en sortir», avait-il expliqué.

Mais cinq mois plus tard, le 22 septembre 2019, le Président prit un autre cap, lors d’une émission de grande audience avec TV5 Monde et le journal français Le Monde. «Je ne ferai pas ce travail d’aller fouiner dans le passé» rassurant du coup l’allié PPRD-FCC, effarouchant des milieux de la Société civile qui n’ont de cesse de réclamer justice pour des crimes de sang et des crimes économiques commis.

Mais voilà que dans un contexte où des rumeurs s’enflent, Amnesty International fait part d’un sentiment partagé en notant dans un rapport signé par son spécialiste Congo, le Congolais Jean-Mobert N’Senga que depuis l’arrivée au pouvoir de Fatshi, les victimes de la répression politique n’ont toujours pas obtenu justice, même pas les militants de son propre parti UDPS. Entre 2015 et 2018, cette répression a fait plus de 300 morts, des milliers de blessés et de détenus arbitraires, selon ce rapport intitulé «Sans suite».

UN TRAVAIL DES
PROCHES DU PRESIDENT.

Selon ce rapport, le Président Tshisekedi peut faire beaucoup en restant dans ses prérogatives constitutionnelles. «Nous lui demandons de reconnaître personnellement et publiquement la souffrance des victimes et leur besoin de justice.

Nous lui demandons aussi de suspendre toutes les personnes qui sont soupçonnées d’être responsables de ces violations de droits humains commises entre 2015 et 2018 en lien avec le processus électoral afin que ces personnes puissent répondre de leurs actes devant la justice, y compris les personnes qui ont été ciblées par les sanctions de l’Union européenne et des États-Unis d’Amérique pour soupçons de violations graves des droits humains, mais aussi des personnes qui font l’objet de plaintes par les victimes, notamment le commissaire provincial de la police pour la ville de Kinshasa qui est toujours en fonction aujourd’hui, qui s’appelle Sylvano Kasongo, ainsi que tous les autres dont il est question dans le rapport, y compris d’ailleurs Major Lokeso que plusieurs témoins ont cité comme étant responsable de la mort de Rossy Mukendi en février 2018».

Il est clair que les pressions extérieures ont commencé de pleuvoir. Signe que l’état de grâce est désormais derrière. Ainsi, le diplomate américain à Kinshasa Michael A. Hammer dit Nzita peut avec ostentation accueillir l’un des poids lourds de l’opposition, l’ancien chef de guerre de l’Equateur Jean-Pierre Bemba Gombo. Un échange qui n’a pas manqué de donner lieu à une note à la centrale. Ces pressions vont être chaque jour certainement plus précises et plus pressantes si elles ne le sont déjà.

Aux diplomates congolais d’entrer en scène et de se déployer en allant expliquer à leurs collègues, aux décideurs, la vision politique du Président congolais. On sait comment, lors de ses derniers années de pouvoir, un des derniers diplomates de Kabila - Léonard She Okitundu, alors vice-premier ministre en charge des Affaires étrangères - s’était lancé dans les capitales étrangères pour présenter, illustrer, défendre, convaincre et sauver... le régime Kabila.

Ce travail n’incombe certainement pas au Président de la République. Il est celui de ses proches, des membres du Gouvernement, de la communication du Président. C’est vrai que Lambert Mende Omalanga n’est plus en place... pour en entendre au moins un mot. Fort dommage!
ALUNGA MBUWA.


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