Hollande donne quitus à Sassou
  • sam, 24/10/2015 - 18:54

A Dakar, lors de la francophonie, il avait eu un discours. Mercredi dernier à Paris, il reconnaît au président Sassou le choix de consulter son peuple et laisse au peuple brazza-congolais le choix de décider. Très «responsable» François Hollande, se réjouit Brazzaville.

Au Congo-Brazzaville, la mobilisation des opposants au référendum continue. Si le «oui» l’emporte dimanche, il permettrait au président Denis Sassou-Nguesso de briguer un troisième mandat. Mercredi, après deux jours de mobilisation et alors que de nouveaux affrontements ont eu lieu dans la capitale, le président français, François Hollande, s’est adressé à son homologue congolais.
C’est lors d’une conférence de presse à l’Elysée, que François Hollande a donné la position de la France concernant le référendum constitutionnel du 25 octobre. Le chef de l’Etat dit respecter le choix du président Denis Sassou-Nguesso de consulter les Congolais. «Le président Sassou peut consulter son peuple, ça fait partie de son droit, et le peuple doit répondre», a répondu François Hollande, pour immédiatement ajouter: «Ensuite, une fois que le peuple aura été consulté, cela vaut d’ailleurs pour tous les chefs d’Etat de la planète, il faut toujours veiller à rassembler, et à respecter et à apaiser», a déclaré François Hollande aux côtés de son homologue malien, Ibrahim Boubacar Keïta, en visite à Paris. Mercredi, les forces de sécurité du Congo-Brazzaville ont eu recours à des tirs de sommation et des gaz lacrymogènes pour disperser des centaines de manifestants opposés à l’organisation d’un référendum, scrutin qui vise, selon eux, à maintenir indûment au pouvoir le président Denis Sassou Nguesso. Mardi, quatre personnes ont été tuées dans la capitale lors d’affrontements entre policiers et manifestants qui réclamaient le départ du chef de l’Etat.
La prise de position de la France est dénoncée par l’association Survie qui demande une condamnation ferme et des mesures concrètes à l’encontre des autorités brazza-congolaises. «En faisant ça, la France réaffirme son soutien à Denis Sassou-Nguesso en vertu de la préservation d’autres intérêts, des intérêts économiques, stratégiques, alors même qu’en ce moment des Congolais meurent sous les balles du régime», estime Thomas Noirot, membre de l’association en charge du Congo-Brazzaville.
L’opposant à Denis Sassou-Nguesso, Paul-Marie Mpouélé, a lui aussi vivement critiqué les propos du président français. «C’est en totale contradiction avec sa première déclaration au sommet de la francophonie à Dakar. Nous pensons que c’est une totale méconnaissance de la Constitution congolaise actuelle parce que le président français devrait savoir en réalité, que le président de la République, au regard de notre Constitution, n’a pas le droit de convoquer un référendum surtout lorsque celui-ci ne concerne, en réalité, que le changement de Constitution», a-t-il expliqué. Le ministre brazza-congolais des Affaires étrangères congolais, Jean-Claude Gakoso, a, au contraire, salué «des propos pleins de responsabilité» de la part du chef de l’Etat français.
Il y a moins d’un an, lors du sommet de la francophonie à Dakar, François Hollande avait salué les transitions alors en cours en Tunisie et au Burkina Faso dans un discours vu comme une mise en garde aux dirigeants tentés de se maintenir au pouvoir «en violant l’ordre constitutionnel».
A 71 ans, Denis Sassou Nguesso, qui, depuis 1979 est resté tout le temps au pouvoir à l’exception de cinq années, ne peut, en vertu de la Constitution, briguer un nouveau mandat. Le référendum de dimanche doit porter sur des amendements constitutionnels qui pourraient englober un relèvement de l’âge maximum des candidats à la présidentielle et la suppression de la limitation à deux mandats.
L’opposition a rassemblé des milliers de manifestants en septembre dernier pour protester contre ces projets, mais le gouvernement a également mobilisé des milliers de partisans - au moins deux fois plus - le 11 octobre dans les rues de la capitale.
Ce référendum est contesté dans la rue par l’opposition qui a appelé à la «désobéissance civile». Les violences qui ont éclaté mardi à Brazzaville et Pointe-Noire ont fait au moins 4 morts et une dizaine de blessés. L’opposition, elle, dénombre une vingtaine de morts et dénonce l’utilisation d’armes létales pour réprimer les manifestations. De nouveaux affrontements ont opposé mercredi des groupes de jeunes aux forces de l’ordre dans la capitale.Les tensions se sont concentrées sur l’avenue de la Base, près de l’aéroport international Maya-Maya, où des groupes de quelques dizaines de jeunes ont tenté de reprendre les barricades dressées la veille et non encore dégagées par les forces de l’ordre. Ces dernières ont tiré à plusieurs reprises des grenades lacrymogènes sur les manifestants qui circulaient entre les voitures calcinées. Dans le quartier de Makélékélé, des habitants se sont dirigés vers un commissariat en scandant des slogans hostiles au gouvernement. Des barricades ont été érigées et des pneus brûlés mais des renforts militaires ont été dépêchés sur place pour soutenir la police. D’après un journaliste de l’agence Reuters, nombre de riverains ont fui la zone, emportant avec eux leurs effets personnels dans un nuage de gaz lacrymogène. Sur Twitter, des comptes proches de l’opposition font également état de nouveaux affrontements dans les quartiers sud de la capitale, traditionnellement plus proches de l’opposition, mais l’information n’était pas immédiatement vérifiable de source indépendante. Un habitant a confié à l’Afp (Agence France-Presse) que de nombreux magasins avaient été pillés pendant la nuit.
L’Internet mobile, les services de minimessages et le signal de la radio française RFI sont toujours coupés à Brazzaville. Mardi, le ministre de la communication, Thierry Lézin Moungalla, a démenti une interruption volontaire du signal de Rfi par le gouvernement, et évoqué un éventuel problème de maintenance. Les violences ont débuté après l’interdiction d’un rassemblement contre le référendum annoncé par l’opposition. Cette dernière avait rassemblé des milliers de manifestants le 27 septembre pour protester contre ces projets, mais le gouvernement a répliqué en mobilisant ses partisans le 10 octobre dans les rues de la capitale.
Le président brazza-congolais avait pu analyser et sonder les intentions de la communauté internationale, avant de lâcher sa bombe. Après avoir consulté ses homologues congolais Joseph Kabila Kabange, guinéen Alpha Condé à qui il avait demandé de convaincre son ami l’opposant Mathias Dzon de devenir son premier ministre après le changement de la constitution et beninois Boni Yayi, qui a effectué le 21 septembre, un voyage-éclair de 2 heures, à Brazzaville, afin de lui rendre compte du déroulement des événements au Burkina Faso où le général, Gilbert Diendéré, très proche de Blaise Compaoré, avait pris le pouvoir par les armes, Sassou a décidé de s’assumer.
Un exemple traverse tout le temps son esprit: bien que décrié, le Burundais Pierre Nkurunziza n’a-t-il pas réussi à conserver le pouvoir?
Profitant de la situation confuse qui prévalait encore au Burkina Faso, il avait enregistré, dans la journée du 21 septembre, un message annonçant l’organisation du référendum. Cette annonce qui aurait pu attendre son retour au pays (car il est parti le même jour en vacances) est passée dans le jt de 22 septembre, à 20 heures sur Télé Congo, la chaîne officielle. Il écoutera les réactions depuis la plage de Marbella.
La date de la tenue du référendum n’avait pas été annoncée, mais, cela n’était qu’un détail, alors que la révision des listes électorales était lancée, malgré la controverse, par le ministre de l’Intérieur, Raymond Zéphyrin Mboulou.Pour faire valider un texte voulu de modernisation des institutions auprès des membres du Conseil constitutionnel, le président Sassou aurait alloué à chacun un «nguiri» (sac d’argent) de 100 millions de F CFA (152.000 euros).
AVEC AGENCES.


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