- jeu, 02/10/2025 - 08:38
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1646 | JEUDI 2 OCTOBRE 2025.
Son discours du 23 mai donné avec solennité depuis Goma assiégé par la rébellion n’avait laissé aucun doute sur ses rapports avec les rebelles du M23/AFC.
Il venait d'annoncer son arrivée à Goma, l'une des villes du pays assiégées depuis des mois par des mouvements rebelles M23/AFC soutenus par le Rwanda et donc son retour au pays après deux ans d'absence qu'il prenait la parole le 23 mai 2025 avec toute la solennité pour que nul n'en ignore rien depuis certainement la ville de Goma.
S'adressant au Congo et au monde, l'ancien président de la République Joseph Kabila Kabange avait des mots bien choisis qui indiquaient tout sur la direction qu'il avait désormais prise au plan politique.
Extraits :
« Il y a six ans, je prenais congé de mes responsabilités en tant que Président de la République, Chef de l’État. Et - fait inédit dans notre pays - en près de soixante ans d’indépendance, je passais pacifiquement la main à un nouveau Chef d’État. Depuis lors, je m’étais imposé un strict devoir de réserve, y compris quand j’ai fait l’objet, directement ou par mes proches interposés, de provocations, de déni des droits, d’humiliations, d’imputations dommageables et d’autres multiples atteintes à ma dignité. D’abord parce que je suis convaincu que le temps est le meilleur allié de la vérité et un antidote lent, mais puissant, contre le venin du mensonge et de la délation. Mais aussi et surtout, parce qu’agir autrement, aurait fait le jeu de ceux qui, par cette campagne odieuse, cherchaient à détourner l’attention de notre peuple de leur incapacité, aujourd’hui avérée, à répondre à ses attentes et aspirations.
J’ai enfin décidé de briser ce long silence ; de sortir de ma réserve et de m’adresser à vous, parce que l’enjeu est de taille. Il est même existentiel » (...).
NUL DOUTE POSSIBLE.
Puis : « Le cœur serré, je constate qu’à peine six ans après, ce bel héritage en indivision, légué à l’ensemble de notre peuple, a été complètement dilapidé par celui qui en avait reçu la garde ; que notre pays offre un spectacle des plus désolants ; et qu’il suscite d’autant plus de désespoir au sein de notre peuple, et de pitié et de moqueries à travers le monde, que l’inconscience de ses dirigeants ne permet aucun espoir de redressement. Cette détérioration rapide de la situation générale du pays est principalement due à l’ivresse du pouvoir sans limite. Les nouveaux dirigeants s’illustrent, en effet, par une série de remises en cause, reniements et violations intentionnelles de la Constitution, avec en toile de fond, la volonté irrésistible de concentrer tous les pouvoirs entre les mains d’un seul homme au mépris du Pacte Républicain qui cimentait la cohésion de notre people » (...).
Puis : « Militaire, j’ai juré de défendre la patrie jusqu’au sacrifice suprême. Hier au pouvoir, aujourd’hui en dehors du pouvoir, je demeure plus que jamais fidèle à ce serment. En ce moment où le pays est de nouveau divisé, appelé par le destin, j’ai le devoir d’œuvrer à la recherche de la paix et de contribuer à la reconstruction de notre pays qui se meurt. C’est ainsi qu’après quelques années de réflexion sur la crise en cours, après avoir consulté des chefs d’États et des anciens Chefs d’États de la région, ainsi que des acteurs politiques et sociaux, nationaux et étrangers, je fais ce jour, une proposition qui engage la nation toute entière à un sursaut patriotique pour un pacte citoyen, afin de tirer le pays du gouffre. Le travail hardi qui s’impose à nous, portera notamment sur les douze points suivants : mettre fin à la dictature, mieux, à la tyrannie ; arrêter la guerre ; rétablir l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire national; restaurer la démocratie en revenant aux fondamentaux d’un véritable État de droit ; rétablir les libertés fondamentales ; réconcilier les congolais et reconstruire la cohésion nationale ; relancer le développement du pays par la mise en place d’une bonne gouvernance économique, d’une gestion administrative et financière orthodoxe, et d’une répartition équitable des ressources nationales.
Relancer le dialogue sincère et permanent avec tous les pays voisins en vue de l’instauration de la paix et du développement durables dans la région ; rétablir la crédibilité du pays auprès des partenaires, aux niveaux tant régional, continental qu’international ; neutraliser tous les groupes armés nationaux et étrangers, et, rapatrier ces derniers dans leurs pays d’origine; mettre définitivement fin au recours et à l’utilisation des mercenaires, conformément à la Convention de l’Union Africaine sur l’élimination du mercenariat en Afrique, du 3 juillet 1977, et à la Résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies numéro A/44/34, du 04 décembre 1989, portant adoption de la Convention Internationale contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’instruction des mercenaires; et rapatrier, sans condition, ceux qui sont déployés sur le sol congolais ;
Ordonner le retrait, sans délai, de toutes les troupes étrangères du territoire national. À ce sujet, je salue la décision sage, des pays de la SADC, de retirer les troupes de la SAMIDRC de notre pays. Vu l’immensité de la tâche ainsi décrite, je lance un appel solennel à tous les Congolais, sans distinction de sexe, d’ethnie, d’âge, de classe sociale, de zone géographique, ou d’appartenance politique, qui aiment passionnément le Congo, qui sont prêts à tous les sacrifices, qui adhèrent sans réserve au Pacte Républicain de Sun City, et qui tiennent au respect de la Constitution du 18 Février 2006, à s’unir autour de ces objectifs. Il s’agit de la refondation de l’État et de l’édification d’un pays qui a perdu ses repères.
Mobilisons-nous, et mettons à profit tous les moyens à notre disposition, pour restaurer l’unité nationale, sauver le Congo et préserver son indépendance car l’Afrique et le monde nous regardent » (...).
Enfin, la finale : « Mes Chers Compatriotes, le Congo vaut mieux que la caricature qu’en donnent ses dirigeants actuels. Le Congo mérite mieux que cette politique extérieure, faite de jérémiades et de mendicité. J’ai donc la ferme conviction que le peuple congolais est capable aujourd’hui, comme en 1960, de vaincre les démons de la division. Qu’il est capable, aujourd’hui, comme au cours de la décennie quatre-vingt-dix, de vaincre la tyrannie et la tentation du pouvoir absolu. Qu’il est capable aujourd’hui, comme en 2003, de prendre le dessus sur ce qui nous divise, et de mettre fin à la violence armée qui oppose ses enfants. Pour y parvenir, chacun doit jouer sa partition. Je m’engage à jouer la mienne ».
Le 27 mai 2025, quatre jours après la diffusion par les médias de ce discours, je postais un texte sur mon compte X (ex-Twitter).
Le voici : « J’aurais été @kikayabinkarubi @NehemieMwilanya @RamazaniShadary pour @josephkabila01, j’aurais proposé un discours à la Mandela : « On m’a tout renié : mon père, ma femme, mes enfants, ma sœur, mon Église, mon pays, pour le Congo, je tends la main à Félix ». Il aurait été applaudi », @kkmtry. Quel succès pour ce texte : 25.000 vues (24,4k) en quelques heures.
Le même 27 mai, peu avant, j'avais posté le texte ci-après : « Plutôt que de faire une énième guerre à son pays, malgré son « à bientôt » de Windhoek en 2018 dit à ses pairs, j’attendais de l’ex-Président une énorme surprise le rapprochant du chemin de la nécessaire paix voulue par @POTUS qui marquerait l’Histoire. Malédiction ou abomination ?», @kkmtry.
Et, pour être plus complet, plus d'un mois avant, le 19 avril, quand les rumeurs se faisaient de plus en plus fortes sur le retour par Goma de l'ancien président, j'avais posté le texte que voici : « Qu’un ex-Président de la République resté deux ans hors du pays qu’il a dirigé pendant deux décennies, regagne ce pays par une porte occupée par une armée étrangère, interpelle sur ses nouvelles convictions. J’ai hâte à entendre sa communication annoncée par ses services », @kkmtry.
Quand il a pris la parole le 23 mai, il n'y avait plus le moindre doute sur les intentions de l'ancien président. Tel qu'il l'avait annoncé à ses pairs à Windhoek en 2018 en leur disant « à bientôt », Kabila était déterminé plus que jamais de retrouver son trône. La guerre était ouverte avec son successeur, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo. À chacun de se tenir prêt.
D. DADEI.