Il ne fait l'ombre d'aucun doute qu'il avait été piégé
  • ven, 30/09/2022 - 13:38

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1562|VENDREDI 30 SEPTEMBRE 2022.

Il n'aura fait que six jours de geôle. Mardi 27 septembre au soir, Vidiye Tshimanga Tshipanda a quitté la prison centrale de Makala où l'ancien conseiller spécial du Président de la République en matière stratégique était détenu depuis le 21 septembre. Le parquet lui a octroyé le régime de liberté provisoire.
Selon un magistrat cité par des médias, Vidiye Tshimanga Tshipanda va continuer de comparaître en étant libre au parquet général près la cour d'appel de Kinshasa-Gombe qui poursuit son instruction sur la tentative de corruption et de trafic d'influence, faits se rapportant à ses conversations filmées avec des supposés investisseurs dans le secteur minier.
Auditionné mercredi 21 septembre par le parquet général près la cour d'appel de Kinshasa-Gombe, placé sous mandat d’arrêt provisoire le même jour, l'ancien conseiller stratégique est poursuivi pour des faits constitutifs de prévention de corruption présumée après une vidéo le montrant en train de négocier des pourcentages de commission pour sa société COBAMIN avec des pseudos investisseurs.
Dès le lendemain de la diffusion de cette vidéo et de la parution de l'article du quotidien suisse de référence Le Temps, Vidiye Tshimanga Tshipanda a démissionné de son poste.

IL Y A DES MOTS QU'ON NE DIT PAS.
Il y a des mots qui ne passent pas. En amitié ou, plus que ça, en politique. Des mots impardonnables. Des mots blasphème. Certes, on ne le sait pas toujours. Mais recourir à certains mots, dans une société humaine millimétrée, peut conduire inexorablement à un point de non retour. Au fond, à la rupture de tout lien.

Pour le cas de l'ex-conseiller spécial en matière stratégique du Chef de l’État, Vidiye Tshimanga Tshipanda, qui a remis sa démission, de gré ou de force - certainement de force - car publiée certes le même jour, le 16 septembre 2022 - soit, le lendemain de la divulgation de ses vidéos par le quotidien suisse de référence Le Temps, av. du Bouchet 2, 1209 Genève, Suisse, tél +41 848 484 805 - mais peu après une communication stricte du directeur de la cellule de communication de la présidence de la République qui invoquait «la rigueur de la déontologie» et celle du «règlement d'ordre intérieur du Cabinet présidentiel (...) » -, on peut recenser trois exemples de phrases qu'un haut fonctionnaire de l'État ne prononce pas.

D'abord, oui ou non, que Vidiye Tshimanga Tshipanda ait promis «d’user de son influence pour obtenir des licences d’exploitation minière, éviter la paperasserie aux investisseurs et «protéger» leur investissement contre des fonctionnaires indiscrets»», passe.

Que le conseiller spécial du Chef de l’État ait été «plus tard, jusqu’à suggérer qu’il agit pour le compte du président» de la République, faisait de lui, un désespéré.

Autre cas de non retour ? Certainement pas quand le conseiller évoque l'année de sa rencontre avec le Chef de l’État - « en 2014, et nous sommes devenus très proches » sauf que c'est déjà trop juste, mais c'est de dire : «il vient chez moi, nous dînons ensemble à la maison». Pire, ce péché éternel : « Sa femme, c’est une bonne amie de ma femme ».

Dans la même lignée de ces mots qu’on ne dit pas quand on est «un proche» d'un Chef de l'État : «Vous avez besoin de personnes puissantes pour protéger votre investissement et être avec vous. Et je ne sais pas s’il y a des personnes plus puissantes que le président».

La suggestion - la pression - exercée par l'ex-conseiller stratégique sur ces « amis investisseurs » est puissante. Politiquement inacceptable.

Mais qui sont ces « fameux investisseurs » qui ont systématiquement piégé le conseiller spécial ? Des agents des Services spéciaux occidentaux à voir le nombre de rencontres organisées et payées par eux ? Des « simples » lanceurs d’alerte ? Des acteurs économiques déçus, décidés de se faire payer cash ?

Des individus qui voulaient voir le Congo «nettoyé» et avaient agi après que Vidiye Tshimanga Tshipanda ait «truqué» les ventes de licences minières ? L'article du Temps - une enquête réalisée en partenariat avec le consortium d’investigation OCCRP, spécialisé dans la lutte contre la corruption - signé Antoine Harari, Clément Fayol, n’en dit pas plus.

Extraits de ce long texte incendiaire repris par tous les médias au Congo et travaillant sur le Congo publié jeudi 15 septembre 2022 à 16:00’, modifié vendredi 16 septembre 2022 à 09:06’.

« JE PRENDRAI MON POURCENTAGE ».
Par une chaude après-midi de juillet 2022, Vidiye Tshimanga, l’un des hommes politiques les plus haut placés de la République démocratique du Congo, quitte en taxi son hôtel de luxe du quartier de St. James à Londres, pour se rendre au Hide, un restaurant étoilé Michelin fréquenté par l’élite de la capitale. Il a un rendez-vous possiblement lucratif.

Son vol, son hôtel, ses repas et ses courses en taxi ont été pris en charge par un homme et une femme qui prétendaient travailler pour un conglomérat basé à Hongkong et s’intéresser aux minéraux congolais. Au cours d’une visioconférence d’une demi-heure le mois précédent, Tshimanga avait été interrogé sur ses liens avec le président Félix Tshisekedi. Satisfaits de ses réponses, ces mystérieux investisseurs lui avaient proposé cette rencontre à Londres.

Mais il ne s’agissait pas d’investisseurs ordinaires. Au cours de trois réunions, une en ligne et deux en personne, le duo a enregistré Vidiye Tshimanga à son insu, alors qu’il se vantait de sa proximité avec le président et proposait de créer avec eux une société dans laquelle il détiendrait une participation déguisée par des prête-noms et des montages offshores opaques.

«Si nous faisons des affaires ensemble, je prendrai mon… pourcentage de l’investissement et je gagnerai de l’argent», affirme-t-il sans détour. En contrepartie, continue le conseiller stratégique du président congolais, il promet d’user de son influence pour obtenir des licences d’exploitation minière, éviter la paperasserie aux investisseurs et «protéger» leur investissement contre des fonctionnaires indiscrets.

Plus tard, il ira jusqu’à suggérer qu’il agit pour le compte du président.
«Si je demande [au président] quelque chose, il donne», déclare Vidiye Tshimanga, en anglais. «Moi, c’est le président… Le président ne fait pas d’affaires [directement]».

Dès leur premier échange en ligne, le conseiller congolais propose aux investisseurs de s’associer avec sa société congolaise, la COBAMIN. Chemise noir mat à col mao, crâne rasé brillant, petit bouc grisonnant et lunettes carrées sans monture, le conseiller prend rapidement ses aises.

Il décrit un accord qu’il aurait conclu par le biais de COBAMIN avec la société Ivanhoe Mines, cotée en bourse à Toronto...
avec LE SOFT INTL.


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