L’étau se resserre autour du D-G de la RVA Abdallah Bilenge
  • lun, 14/09/2020 - 17:31

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1499|LUNDI 14 SEPTEMBRE 2020.

S’il bénéficie de très solides soutiens au sein de différents cercles politiques congolais, c’est le moins que l’on puisse dire. Alors que le Conseil des ministres venait lundi 4 mai de l’indexer en ordonnant une enquête sur sa gestion de la Régie des Voies Aériennes du pays, RVA en sigle, le D-G PPRD-FCC Abdallah Bilenge est le seul, à la surprise générale, à être reconduit, un mois plus tard, mercredi 10 juin 2020, à son poste de Directeur Général d’un service public ou d’une entreprise publique lors de la lecture sur les antennes de la télévision publique Rtnc d’une série d’ordonnances que venait de rendre publique le cabinet du Président de la République.

Il y trône depuis les troubles de 2015 de par la volonté de la ministre du Portefeuille de l’époque, autorité de tutelle, l’actuelle présidente de l’Assemblée nationale Mme PPRD-FCC Jeanine Mabunda Lioko après la révocation du D-G franco-libanais Jean Asisse dont il fut un simple assistant et dont le départ fut justifié par la fin du contrat ADPI/KPMG qui liait l’Aéroport de Paris International avec la RVA et que les syndicats de l’entreprise ne voulaient pas voir renouveler.

Lors de la lecture de ces ordonnances, Bilenge venait cependant de perdre son président du Conseil d’administration, l’ex-ministre de la Communication et des Médias dans un Gouvernement Gizenga, passé ministre d’État à la Reconstruction sous Adophe Muzito, le professeur de sociologie FCC-PPRD Émile Bongeli Yeikeo Ya Ato remplacé par l’ex-ministre AAB-FCC Bienvenu Liyota Ndjoli. Abdallah Bilenge avait désormais comme directeur général adjoint un membre du CACH-UDPS William Pambu Pambu. Un vrai exploit !

PLACARDS
PLEINS DE CADAVRES
A LA RVA.

Pourtant, que de placards pleins de cadavres. Où en sont les enquêtes ou les résultats des enquêtes que le Vice-premier ministre en charge de la Justice Célestin Tunda Ya Kasende (ou, en l’espèce, son intérimaire, le Vice-ministre de la Justice, l’UDPS-CACH Bernard Takahishe Ngumbi) aurait dû diligenter ou est supposé avoir diligenté sur instruction du Conseil des ministres présidé par le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo?

En l’espèce, il était reproché à la gestion Bilenge à la Régie de Voies Aériennes, de faits de mégestion dès lors que la RVA n’avait su verser des salaires d’avril à son personnel sous prétexte des effets de la pandémie de Covid-19 invoquant un manque à gagner réalisé pour les mois de mars et avril de 23.215.764 $US. Comment alors expliquer cette reconduction d’office sinon par d’importants soutiens dont tire profit ce puissant Directeur général ?

Mais voilà que sur un autre dossier, celui de la taxe aéroportuaire connue sous l’appellation de Go-Pass, la justice rattrape le D-G Bilenge convoqué, à plusieurs reprises, par le parquet général près la Cour d’Appel de Kinshasa-Matete et, particulièrement, le 24 août dernier. Selon des informations des milieux financiers congolais, Abdallah Bilenge aurait gagé, contre plusieurs millions de $US, la recette provenant de la vente de cette taxe.

Ainsi, les banques de Kinshasa se sont partagées la recette de survol des compagnies aériennes si bien qu’aucun projet ne peut plus être initié à la RVA pour de longues années. Est-ce là la raison du maintien d’Abdallah Bilenge avec le risque que le remplacer exposerait les comptes de l’entreprise et les mettrait en grand danger ? Si le parquet financier a lancé des réquisitions d’informations auprès des banques, des hauts cadres de certaines de ces banques ont été entendus et ont passé aux aveux et l’IGF s’apprête à entrer en scène. L’étau se resserre peu autour du D-G Bilenge...

Le parquet plonge aussi présentement dans un lourd dossier en rapport avec des faits de détournement des deniers publics en lien avec la législation sur les marchés publics. Il s’agit des dépenses qualifiées «d’exorbitantes» réalisées à la Régie des Voies Aériennes par son Directeur général. D’après des documents que le Soft international a pu compiler, les détournements porteraient sur une somme de près de 50 millions de $US allant des années 2014 à 2018. Ils vont des travaux de renforcement des pistes et de réfection du balisage aux travaux de taxiway et drainage des pistes ou d’installation de matériels. D’autres portent sur l’acquisition des mobiliers, des bus passagers COBUS où d’aménagement des parkings des aéroports ou de lutte anti-érosives.

Quatre des plus gros marchés dans lesquels la direction de la RVA se serait compromise portent le premier sur la construction de la nouvelle aérogare de Kinshasa-N’Djili conclu en 2018 pour 20 millions de $US, l’autre sur près de 6,8 millions de $US gagné par la firme Studi portant sur la surveillance et le contrôle des travaux de cette aérogare tout comme un autre portant sur 6,7 millions de $US portant sur des travaux de réhabilitation et de modernisation de l’aéroport de Kisangani.

Les deux autres portent, l’un sur près de 4 millions de $US, marché portant sur des travaux de taxiway et de drainage de l’aéroport de Goma, l’autre l’installation d’une scolarisation de 2,3 millions de $US. Tous ces marchés ont été passés de gré à gré sans suivre la procédure légale de passation des marchés publics dans le pays.
Des compagnies telles que Safricas, Salvador, Malta Forest, Sapsana AB, Ngase, Studi ou l’Office des Routes, etc., sont recensés parmi de nombreuses autres des plus connues et des moins connues ayant tiré profit de ces procédures qui ont cours à la RVA.

Selon des milieux judiciaires, il est reproché à Bilenge des «faits graves et répétitifs de mégestion sous forme de double voire de triple paiement des travaux qui sont soit fictifs soit surfacturés passés de gré à gré et sans avis préalable de la Direction Générale de Contrôle des Marchés Publics, actes de prévarication consommés dans la période allant de 2014 à 2019».

20 MILLIONS $US
DECAISSES POUR LA NOUVELLE AEROGARE.

Pour l’essentiel, il s’agit des cas portant sur des marchés des aéroports de Kindu, de Mbuji Mayi et de N’Djili. C’est le cas du projet de construction de la nouvelle aérogare de Kinshasa-N’Djili dont la première pierre fut posée avec pompe le 2 mai 2018 par le président de la République d’alors Joseph Kabila Kabange en plein dans le débat électoral (présidentiel et législatif) mais qui n’a jamais connu aucune suite.

Évalués à 364,9 millions de $US pour un contrat d’une durée de 36 mois signé entre la RVA et le groupe chinois WIETC, Weihai International Economic and Technical Coopérative et financé conjointement par Exim Bank of China (60%) et le Congo (40%), les travaux de cette aérogare comprenaient plusieurs ouvrages dont une nouvelle aérogare d’une superficie de 40 617 m2 comptant un rez-de-chaussée pour les arrivées, une mezzanine pour les transits et un niveau supérieur pour les départs.

Le bâtiment devrait disposer des comptoirs d’enregistrement, des salles de bagages arrivée et départ, des appartements, des espaces publics, des galeries marchandes, etc. Il était en outre prévu 74.517 m2 de nouveaux tarmacs connectés à l’aérogare par des sas d’une capacité d’accueil simultané de dix aéronefs, un parking à véhicules de 1.200 places avec fontaine, ainsi que le prolongement des taxiways parallèles et des bretelles de 68.891 m2. Les travaux prévoyaient l’installation d’outils informatiques modernes d’exploitation et de télésurveillance des installations et alentours, une déviation du boulevard Lumumba sur 5 km, ainsi que la formation du personnel destiné à exploiter les futures installations. Une fois achevée, cette aérogare permettra de répondre aux besoins de flux annuel des trafics d’aéronefs et de passagers, estimé à 3 millions. Qu’a-t-on fait des 20 millions de $US décaissés par le Trésor public?
D. DADEI.


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