La CSJ lors de l’investiture du Président de la République. DROITS RESERVES.
La Cour Suprême de Justice lave blanc
  • dim, 29/04/2012 - 10:09

LE SOFT INTERNATIONAL N° 1165 DATE 27 AVRIL 2012
Une vraie saignée, le moins que l’on puisse dire. Le gâchis jadis dénoncé ici même dans le travail effectué par la Commission électorale lors des Législatives du 28 novembre 2011.
A la législature passée, c’est une dizaine de mandats qui avaient été retoqués par la Haute Cour. En 2011, c’est le double - déjà! - en attendant que d’autres chambres clôturent le traitement des dossiers qu’elles instruisent.

Dans son arrêt rendu mercredi 25 avril tard dans la soirée, une première fournée de Députés dit ainsi adieu à l’hémicycle.
Parmi les plus connus, on compte le gouverneur de l’Equateur Jean-Claude Baende, président de l’Adh.

«LA CENI DU GACHIS».

Dans la circonscription de Kalemie au Katanga, la Cour a proclamé élue Vicky Katumwa de l’Udco à la place d’Emmanuel Ngoy Mulunda Nyanga de ECT qui avait été déclaré élu par la Commission électorale.
Selon des milieux proches du dossier, la Haute cour a tenu compte de ses propres données compilées avant de rendre son arrêt.
C’est le cas de Kalemie où Vicky Katumwa n’avait pas introduit de recours en contestation des résultats, ni son parti qui ne pouvait ester contre lui-même.
A Kinshasa, les députés Oscar Kiziamina, Serge Welo, Mbuta Muntu, Michel Kabeya, Colette Tshomba et Jean-Jacques Mutuale se trouvent sur la liste de députés retoqués par la Cour. Patrick Bologna remporte la bataille juridique contre Jean-Jacques Mutwale.
Au nombre de réhabilités figurent Henriette Wamu, Député de la dernière législature après une validation par la même Cour suprême de justice, et Laurent Batumona élu à la Funa.
L’invalidation des députés et la validation des autres sont aussi intervenues dans plusieurs autres circonscriptions du pays dont à Fizi où l’ancien homme fort du régime Mobutu, Anzuluni Bembe est invalidé au profit de Shenila Mwanza.
La Cour suprême de justice n’a confirmé l’annulation que des scrutins de la seule circonscription de Masisi au Nord-Kivu où des troubles avaient été signalés pendant le vote.
Du coup, la Haute cour enjoint la Commission électorale à publier les résultats des circonscriptions électorales de Punia, Bikoro, Ikela, Kole,
Ndemba, Kiri et Lomela.
On rappelle que la Cour suprême de justice est la dernière juridiction du pays. Ses décisions sont sans appel.
Il n’empêche que des questions se posent quant aux méthodes de travail de la Cour. Comment a-t-elle travaillé pour en arriver à ces arrêts? Les recomptages ont-ils été faits? Si oui, devant devant quels témoins? Pour être valides, si elles ont eu lieu, ces opérations de recomptage ne devraient-elles pas être faitees devant les intéressés eux-mêmes, c’est-à-dire, les Députés poursuivis devant la Haute Cour?
On rappelle l’opacité décriée de la Commission électorale... Une opacité a-t-elle remplacé une autre?
Dans un dossier intitulé «La Céni du gâchis, procès à charge et à décharge», Le Soft International (n°1146, 1ère éd. mercredi 18 janvier 2012) écrivait ce qui suit:
Au total, les «erreurs», les «irrégularités», les fraudes commises par la Céni ou sous son regard sont trop extravagantes à ce point qu’elles déconsidèrent les meilleurs résultats qu’elle aurait pu engrangés par ailleurs.
A la décharge du pasteur président, cette faute du législateur lui-même!
Sous Mobutu où tout n’était pas que pire, les présidents de bureaux de vote se recrutaient parmi les plus hauts dirigeants d’entreprises publiques - Gécamines, Sncc, Snél, etc. -, les plus hauts magistrats du pays, les plus hauts fonctionnaires qui en dissuadaient par leurs galons le premier candidat corrupteur. Ce n’est pas le cas avec la loi électorale n°11/003 du 25 juin 2011 qui rend maîtres après Dieu des maîtres du primaire, des petits profs chrétiens du secondaire pas ou mal payés - 15 Usd par les églises - et à qui, dans le cadre d’un contrat précaire, le projet PNUD-PACE a promis de payer 150 $ à la fin du processus électoral quand des candidats Députés fortunés et indélicats se présentent dans des prés avec des attachés-case bourrés de dollars.
C’est en effet en partie la faute à la loi. Celle-ci dispose qu’aussitôt le vote terminé, le bureau de vote se transforme automatiquement en bureau de dépouillement qui, «aussitôt le dépouillement terminé, le résultat est immédiatement rendu public et affiché devant le bureau de dépouillement» (art. 68 de la Loi n°11/003 du 25 juin 2011) quand «les procès-verbaux de dépouillement et les pièces jointes sont acheminés pour centralisation et compilation au centre local de situé dans chaque circonscription électorale» (art. 69, opt. cit).
En plaçant le pouvoir de décision à un niveau aussi bas (64.000 bureaux de vote, 15.000 centres de vote, 169 Clcr (Centres locaux de compilation des résultats), en refusant à la Céni toute possibilité de contrôle de cohérence et de redressement, le législateur croyait gagner en transparence. En 2006, un seul centre de compilation avait fonctionné, le fameux Cncr, situé à la Rénapi à Kinshasa. Il a décuplé les occasions de fraude en accordant d’énormes pouvoirs - l’autonomie jusqu’à l’affichage des résultats dans une société de désintégration morale accentuée - à des humbles citoyens incapables de résister à la tentation de corruption ou aux pressions de candidats faisant valoir leurs titres de ministre, sénateur, député, etc. à des maîtres d’école, étudiants et chômeurs recrutés localement, ravagés par la misère et la famine, ayant par ailleurs des liens avec des candidats. «Au lieu de disposer comme en 2006 d’un seul centre national de complication, le législateur de 2011 a créé 169 centres locaux de complication», ironise un analyste.
Au fond, la Céni pose un réel problème. A la crise mentale ambiante qui couvait dans le pays (et que justifiait la tentation d’un vote protestataire face à une situation générale figée), aux vraies ou fausses attentes qui parcouraient le pays (une frange de compatriotes estimant leur ère venue d’exercer enfin le pouvoir tant de fois perdu), à la résurgence d’un discours identitaire encore trop ancré dans le mental de Congolais et contre lequel aucune politique pensée n’a pu être menée et que distribuent trop facilement les réseaux sociaux animés par une diaspora - contrairement à la diaspora vieillie et croûlante des années Mobutu - passée à l’ère CNN, BBC, parlant anglais, français et allemand, frappant aux vraies portes à l’étranger, l’institution citoyenne a proposé une réponse trop mauvaise faite de fautes accumulées qui la fait hautement suspecter.
Du coup, la Commission électorale nationale indépendante a mis en péril les Institutions - la République - qu’elle se devait de protéger et de défendre. Gâchis total!
Le Président de la République a-t-il compris la tragédie dans laquelle cette Céni a plongé le pays? Nul ne peut en douter!
Lui qui, comme de Gaulle, a pris le large, seul avec la Première Dame et les enfants, depuis un mois, dès le lendemain de son investiture le 20 décembre et n’est retourné dans la Capitale que le temps de prononcer des vœux protocolaires! De Gaulle à Colombey-Les-Deux-Eglises. Face au devoir de réflexion, l’homme d’Etat prend de la hauteur, s’isole pour mieux appréhender le destin qui le guette!
Dire que le pays attend tout de cet éloignement du Président de la République, loin du tintamarre kinois, est une Lapalissade.
D. DADEI

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