- lun, 17/11/2025 - 09:39
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
LE SOFT INTERNATIONAL N°1648 | VENDREDI 14 NOVEMBRE 2025.
Il fut l'homme de la guerre froide entre l’Ouest et l’Est, le capitalisme et le communisme. Joseph-Désiré Mobutu débaptisé Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Zabanga, avec la politique de recours à l'authenticité, est désormais reconnu et honoré publiquement à Kinshasa.
Changement de paradigme ? L'homme fut reçu vingt-quatre fois par la famille Bush, jusqu’à leur demeure familiale du Texas, était chaleureusement accueilli à Londres par la reine Elizabeth II à la gare Victoria, par l'Empereur et l'Impératrice Hirohito du Japon au bas de l'avion, par Charles de Gaulle à Paris au palais de l'Élysée, etc. Nul doute, Mobutu fut un immense homme en Afrique, adulé aux Nations-Unies, chargé par les puissances occidentales d'empêcher l'arrivée du communisme sur le continent, mission qu’il réussit.
À la fin de son règne dans les années 1997, quand son rôle a pris fin avec l’arrivée au pouvoir à Moscou de Gorbatchev qui, d'octobre 1985 à décembre 1991, déploie sa politique de réformes (Perestroïka et Glasnost) et fait disparaître les enjeux de la guerre froide, pour lui marquer sa reconnaissance, l’Occident par le président américain Bill Clinton, dépêche à Kinshasa le diplomate de choc Bill Richardson, entouré des agents de la Maison blanche, du Département d’État, de la CIA, du Pentagone, pour lui demander fermement de quitter le pouvoir, de céder celui-ci au chef rebelle Laurent-Désiré Kabila soutenu par des pays de la sous-région, notamment le Rwanda, l'Ouganda, le Burundi, l'Angola sauf s’il veut voir «son corps traîné dans la rue comme celui d’un chien».
Le 16 mai 1997, après l’échec du sommet des Chefs d’État à Libreville où il s’était rendu pour appeler à l’aide, à la suite de la demande pressante de ses généraux qui l’ont abandonné, Mobutu fait ses adieux à la capitale Kinshasa, s’envole avec sa famille pour son village de Gbadolite, à l’Équateur, se confine dans l’un de ses palais, est poussé dès le lendemain 17 mai, de reprendre un avion-cargo enbedded dans son véhicule, après les menaces proférées par ses propres troupes de la DSP de l’abattre.
RETOUR DES RESTES.
Il s’en va pour Lomé, au Togo, ville qu'il quitte quelques jours après. Son ami Étienne Gnassingbé Eyadema lui a exprimé sa gêne de l’accueillir. Mobutu se rend à Rabat, au Maroc. Le roi Hassan II lui ouvre les frontières du royaume. L’ex-maréchal du Zaïre meurt le 7 septembre 1997 des suites d'un cancer de la prostate, à l'hôpital militaire Mohammed V de Rabat, quatre mois après sa chute. Il est enterré au cimetière européen de Rabat où il repose depuis sans que nul ne sait quand et comment les restes de l'ancien président seront rapatriés.
Il a fallu vingt-huit ans depuis et l'arrivée au pouvoir de Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo pour que les choses commencent à peu à se dessiner avec le retour au pays de l'un des enfants de Mobutu, François Mobutu Nzanga Ngbangawe qui a pris ses quartiers dans la capitale. Avec sa famille, dont son frère sénateur Albert-Philippe Giala Kassa Mobutu, Nzanga a ouvert, le 14 octobre à Kinshasa, dans le hall et dans la mezzanine du Musée national, à côté du Palais du Peuple, œuvre de Mobutu et des Chinois, une exposition intitulée « Mobutu, une vie, un destin ».
Des photographies rares venant des fonds privés et publics, des objets personnels et emblématiques de Mobutu, des trônes sur lesquels « le roi du Zaïre » s’asseyait, ses bustes voire les monnaies anciennes.
« La meilleure façon pour moi de parler aux jeunes et de parler du maréchal, c’était de présenter des photos. Parce qu’il n’y a aucun discours, il n’y a aucun texte qui pourra mieux le décrire qu’à travers les différentes facettes de sa personnalité », explique le leader du parti Union des démocrates mobutistes, UDEMO, qui fut vice-Premier ministre chargé des besoins sociaux fondamentaux dans le gouvernement de Muzito, formé le 26 octobre 2008, promu vice-Premier ministre chargé du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale.
L'exposition a connu le 28 octobre la visite du président de la République suivi le 30 octobre 2025, par la première ministre Judith Suminwa Tuluka.
Accompagné par Nzanga Mobutu, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a, selon ses proches, « fait une relecture nuancée et documentée de la vie, du règne et de l’héritage du président Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga», l'homme qui a gouverné l’ex-Zaïre pendant plus de trois décennies, de 1965 à 1997.
À la fin de sa visite, le Chef de l’État a signé le livre d’or en mémoire du feu Président Mobutu.
« À travers cette exposition émouvante, la Nation congolaise redécouvre un chapitre méconnu de son histoire, incarné par la figure du Président Mobutu, un symbole de l’Union nationale, de l’affirmation de notre souveraineté et de la valorisation de nos racines cultures authentiques », a-t-il écrit.
Pour Mme Judith Suminwa Tuluka, l'exposition « Mobutu, une vie, un destin» est « un rappel historique qui a jalonné ma vie. Je connais le Président de par l’histoire depuis que je suis née jusqu’à ce que j’arrive à l’âge adulte. Toute mon enfance, je l’ai eue sous le Président Mobutu »,
a-t-elle déclaré aux médias, plaidant pour une lecture constructive de l’histoire. « On parle de souveraineté, on parle d’intégrité territoriale… La vie du Président Mobutu a toujours été cette question d’unité nationale, cette question d’intégrité, de souveraineté. Et c’est ça qu’il faut transmettre à nos enfants. On ne peut pas effacer l’histoire, parce que l’histoire est importante. Ça nous permet de nous rappeler et de voir comment nous allons avancer. Si on l’efface, on se perd ».
Prévue pour fermer le 30 octobre, l'exposition est prolongée à la suite du succès.
« Vu l’engouement, il nous a été demandé de continuer. Donc, on va poursuivre probablement jusqu’au mois de décembre », a déclaré Mobutu Nzanga « très content » des visites, notamment des écoles et des familles.
ALUNGA MBUWA.





